Si l’époque des samouraïs s’est achevée avec l’ère Meiji, ce sont aujourd’hui leurs descendants qui perpétuent leur mémoire, ainsi que tout l’artisanat traditionnel japonais.
Dans la préfecture de Nagano, on trouve encore des forgerons de sabres japonais ; et sur les 300 forgerons enseignant leur art dans tout le Japon, une trentaine sont natifs de cette région.
C’est dans la ville tranquille de Sakaki, au Nord-Est de Nagano et à deux heures de Tokyo, que nous partons aujourd’hui. Sakaki, c’est 17 000 habitants, des paysages de collines, et la rivière Chikuma qui la traverse. Mais c’est aussi et surtout un musée : le « Musée Tetsu (du fer) », qui honore la mémoire de feu Yukihira Miyairi, Trésor National Vivant dont la tradition est perpétuée par son fils et ses apprentis.
Le musée expose à la fois les chefs-d’œuvre du maître et ceux des autres forgerons de l’école Miyairi ; ainsi qu’un panorama chronologique de sabres, du XIIIème siècle jusqu’aux lames contemporaines issues de l’industrialisation du Japon. On considère généralement que l’apogée des lames japonaises, aussi bien en beauté qu’en fonction, se situe entre la fin de la période Heian (794-1185) et la période Nanbokucho (1336-1392).
La collection personnelle de M. Miyairi Yukihira, ouverte au public, permet de compléter la visite.
Au rez-de-chaussée et au premier étage sont présentés différents modèles de lames ainsi que des explications sur leur histoire et leur forgeron. On pourra également y apprécier les étapes successives de la fabrication d’une lame japonaise, et notamment l’orikaeshi tanren, un procédé de forgeage consistant à replier l’acier de la lame chauffée au rouge sur lui-même jusqu’à obtenir environ 30 000 couches.
Cette technique est à l’origine de la structure unique des lames japonaises, composées de couches d’acier de différentes teneurs en carbone : le noyau est en shingane, un acier souple à faible teneur en carbone, puis on y ajoute une partie en kawagane, un acier de dureté intermédiaire, et une couche de hagane, un acier très dur. Ces différents types d’acier sont tous issus du tamahagane, un acier composé de satetsu (sable de fer japonais) et de charbon de bois mélangés dans un tatara (bas fourneau japonais) pendant plusieurs jours. Cette technique, transmise depuis plus de 1000 ans, permet de réduire la teneur en carbone du matériau grâce au chauffage au charbon de bois. Les forgerons japonais achètent le tamahagane à Yokota dans la préfecture de Shimane, puis le chauffent et le trempent dans leurs propres ateliers pour créer des lames.
La salle Sangyo Tenjishitsu au deuxième étage met en avant l’histoire industrielle de Sakaki ainsi que les produits issus de ses compagnies. L’exposition permet aux visiteurs de comprendre le chemin que Sakaki a parcouru jusqu’à aujourd’hui ; le développement de ses industries s’étant opéré en temps de guerre, grâce à l’évacuation des usines des grandes villes.
Le musée du fer de Sakaki est une opportunité inoubliable de découvrir les méthodes ancestrales des forgerons de sabres. A travers cet apprentissage, c’est tout un voyage dans le passé auquel le visiteur est invité : une belle manière de rappeler que les techniques traditionnelles vivent encore aujourd’hui.
Article rédigé par Hannah Assouly et Floriane Poulain, stagiaires à la galerie Espace 4.
Photographies prises par Frantz Fray.
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